Equipe de recherche

Microenvironnement, Signalisation et Cancer (MicroCAN)

Implication des enzymes de déubiquitination dans la progression et la réponse thérapeutique des mélanomes

Résumé :

Le mélanome est la cause majoritaire de décès associés aux cancers de la peau. Sa forte hétérogénéité, son haut potentiel métastatique et sa capacité de résistance au traitement expliquent cette agressivité. Malgré l’apparition des thérapies ciblées inhibant la voie oncogénique BRAF/MEK et des immunothérapies dont les résultats sont impressionnants à court-terme, de nombreux patients sont en échec thérapeutique. En effet la plasticité des cellules de mélanome est responsable de la mise en place rapide de programmes d’adaptation au traitement. Parmi eux, se trouve la capacité de rigidifier la matrice extracellulaire (MEC) qui est lue par la cellule à l’aide du mécanosenseur YAP. Celui-ci engage un programme transcriptionnel renforçant cette rigidification. Par conséquent, une boucle d’amplification positive s’installe ce qui aboutit à un échappement thérapeutique mécano-dépendant des cellules de mélanome. L’identification de nouveaux acteurs de cette boucle et leur ciblage pourrait constituer une nouvelle approche pour lutter contre la résistance thérapeutique. L’activation aberrante de voies oncogéniques ou de résistance au traitement implique la surexpression de protéines et déstabilise ainsi l’homéostasie protéique. Cette dernière est assurée par l’activité protéolytique du système ubiquitine protéasome. En opposition, les déubiquitinases (DUBs) clivent le signal ubiquitine d’adressage à la dégradation pour stabiliser leur substrat. Dans de nombreux cancers, ces enzymes sont détournées afin de moduler des voies oncogéniques impliquées dans la prolifération, l’invasion et/ou la résistance au traitement. Dans ce contexte, les DUBs sont des candidates idéales pour trouver de nouveaux acteurs de la mécanorésistance du mélanome.

Pour les identifier, nous avons couplé une culture de cellules de mélanome sur des matrices de collagène de différentes rigidités avec une technique biochimique d’étiquetage de l’activité des DUBs. En y associant la protéomique quantitative nous avons identifié USP9X dont l’activité est augmentée avec la rigidification de la matrice. Des analyses in silico additionnelles révèlent que YAP appartient à l’interactome de USP9X et montrent une corrélation entre l’expression de USP9X et la signature transcriptionnelle de YAP dans le mélanome. Nous avons donc fait l’hypothèse que l’activité DUB de USP9X stabilise YAP dans le mélanome. En accord avec celle-ci, nous avons montré que la déplétion et le ciblage pharmacologique de USP9X diminuent l’expression de YAP au niveau protéique sans impacter son messager. A l’inverse, la déplétion de l’E3 ligase βTRCP augmente le niveau protéique de YAP. De plus à l’aide d’une technique biochimique nous avons observé une accumulation de la forme polyubiquitinée de YAP sous inhibition combinée de USP9X et du protéasome. Ceci indique que l’activité de USP9X empêche la dégradation de YAP par le protéasome. Nous avons aussi observé que le ciblage de USP9X empêche la mise en place de programmes induits par la rigidification de la matrice comme la translocation nucléaire de YAP, la migration cellulaire et l’invasion. Nous avons généralisé ces observations dans d’autres types de cellules tumorales et dans les fibroblastes associés au cancer, suggérant une large action de USP9X dans la régulation des voies de mécanotransduction tumorale via YAP. Enfin, dans un modèle de mélanome murin syngénique, nous avons montré que le ciblage de USP9X améliore l'efficacité des inhibiteurs de BRAF/MEK, contrecarre le remodelage du collagène induit par les médicaments et retarde la récidive tumorale.

Ces travaux révèlent que la mécano-activation de USP9X stabilise l’oncoprotéine YAP, permettant ainsi la mise en place de la boucle d’amplification positive entre YAP et la rigidification de la MEC et donc l’échappement thérapeutique du mélanome. Par conséquent nous proposons que USP9X constitue une «mécano-DUB » ainsi qu’une cible thérapeutique pertinente dans le mélanome métastatique réfractaire.  

Mots Clefs :

mélanome cutané, mécanotransduction, USP9X, YAP, migration

Amphiteatre vide
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Devant le jury composé de :

Présidente du jury :

Pr Marie-Dominique GALIBERT, DR CNRS, Université de Rennes

Rapporteurs/trices :

Dr Franck VERRECCHIA, DR INSERM, Université de Nantes

Dr Corinne BOUSQUET, DR INSERM, Université Paul Sabatier                        

Directeur de Thèse :

Dr Marcel DECKERT, DR INSERM, Université Côte d’Azur